En flanânt

Maïwenn n'aimait pas les hommes. Point final. Un homme, c'est orgueilleux, c'est souvent méchant, ça ne se soucie en rien de la nature. Bref. Une sale bête quoi.
Cela dit, La Plume aimait venir ici. Ces champs à perte de vue donnaient une curieuse sensation de liberté, de puissance (et oui, on voit si loin, que rien ne peut arriver sans qu'on l'aperçoive.).Elle venait ici, se couchait à la frontière des cultures pour ne pas les abîmer. Dans sa colère contre l'humain, elle aurait tout aussi pu se coucher au milieu de la culture, la piétiner, la massacrer. Mais l'elfe savait que là bas, dans la cité au loin, il y avait des enfants à nourrir. Les enfants, elle aimait bien, Maïwenn, parce qu'au fond un gosse humain n'est pas méchant. Il a d'ailleurs tout des elfes : curiosité et affection du monde qui l'entoure. Mais après,hélas, les grandes personnes de chez lui pensent qu'il est grand temps de lui offrir une EDUCATION. Beuuuuh, l'éducation humaine... C'est complètement antinomique !
Après l'enfant, il apprend le pouvoir, la bêtise, l'hypocrisie, la méchanceté, l'irrespect de la terre et des ancêtres. Et ça devient un homme...
...Finit la douceur.

Un juron s’échappe de ses lèvres. Une malédiction peut-être. Un rictus déforme momentanément ses traits, qui jusque-là ne présentaient qu’une légère impatience. Ses pas ne font presque pas de bruits, les feuilles hésitent à crisser sous ses bottes. Elle ne s’en rends pas compte bien sûr, après tout, ce ne sont que des feuilles. De simples amas à terre, qui ne servent à rien, sauf à crisser sous son chemin.

Crish Crishhh Crisshhhh…

, elle s’arrête. Était-ce elle qui avait fait tant de bruit ? Était-ce une entité inconnue ? Elle aurait dû rester concentrée, elle savait que la forêt réserve maintes mauvaises surprises pour ceux qui ne sont pas sur leur garde. Faisant taire sa respiration un moment, écoutant seulement les bruits de la forêt. Moins d’insecte. Moins d’oiseaux. Plus de petits mammifères, au loin, une corneille. Vite, respirer, plus de sang au cerveau !!

Prenant une grande goulée d’air, son cœur battant à ses tempes, elle se félicita d’avoir su déceler autant de son, d’ordinaire les petits mammifères n’auraient pas su trouver le chemin jusqu’à ses tympans. Bref, elle arrivait dans les champs. Les grandes plaines. Bientôt. Tant mieux, elle arriverait bientôt dans la grande ville. Croyez-le ou non, elle n’y était jamais allée et elle mourrait d’impatience de s’y rendre. Sa flûte avait perdu une clé et elle manquait de pièce, chose qui serait facile à trouver dans la ville. Bien sûr, il va falloir qu’elle change d’habit et de façade, mais tout ça est secondaire.
Eyrie s’avance dans les champs, essayant de changer sa mentalité au fur et à mesure qu’elle approchait de la ville. Oui elle était encore loin mais il faut bien commencer si on veut finir.

Elle était en train de pratiquer son sourire lorsque d’un coup, elle se sentit trébucher. Rien de bien méchant, mais elle avait échappée un cris de surprise, preuve qu’elle était bien embarquée dans son personnage de femme de la ville. D’ordinaire, elle se serait rétablie et aurai sortie un poignard, une main en avant prête à user de son pouvoir. Là, elle s’accroupit puis se mis en posture de défense, mais elle ne pouvait rien voir au travers de l’épais rideau de plantation autour d’elle.

*Un cri...Par là bas.*

Maïwenn se leva d'un bond, poignard en main. On ne sais jamais à quoi s'attendre. Le bruit semblait toutefois être d'origine humaine. On se sent toujours rassuré lorsque l'on peut définir ce qui nous a surpris. Ce qui aurait été plus embêtant,toutefois, serait de tomber sur un humain.

La Plume lança furtivement des regards, à gauche, à droite. Des plantations à perte de vue. Mais elle sentait qu'elle n'était plus seule, ce genre de sentiment que l'on connait tous très bien. L'impression que quelqu'un, quelque chose rôde dans les parages. Maïwenn rangea l'arme, et se tint prête à changer d'apparence si cela s'avérait utile. faire un Emprunt de forme était quelque chose d'extrêmement fatiguant pour son jeune âge, aussi, mieux valait ne pas en user inutilement.

Maï s'avança, a petits pas furtifs, dans la direction du bruit. Elle regardait fixement droit devant elle, ses yeux fixés sur le haut des tiges de blé. La bête idée...

Soudain elle sentit un grand choc contre ses tibias, et ses pieds sautèrent du sol. Elle venait de trébucher sur quelque chose, et, par conséquent, tomber dessus.

"Aïe !"

Des mouvements dans les blés, non pas causé par le vent mais par deux silhouettes. Un petit cri de surprise, puis un autre, de douleur mêlée de surprise aussi.

*Non mais franchement, quelle novice. Je sais qu’on est dans un champ, dans des tiges hautes qui nuisent à la vision mais tout de même, trébucher sur l’ennemi, faut le faire… Je vais lui faire apprendre de ses erreurs, on ne trébuche pas impunément sur Eyrie !! *

Il était temps de revenir à l’Eyrie des grands chemins, celle de sang froid et de cœur de pierre. D’une torsion de poignet, elle saisit l’avant-bras de son assaillante et le bloqua dans son dos. D’un croc-en-jambe, elle la fit s’aplatir sur le sol, avant de saisir sa dague et la poser sur sa jugulaire. Son genou gauche avait coincé l'autre bras et son genou droit faisait pression sur le bas de sa colonne, juste avant le postérieur. Elle aurait beau battre des jambes, ce serait en vain. Vite fait, mais était-ce bien fait ? Après tout, la vagabonde se rendit compte que son adversaire était une elfe, et avec ce peuple, il faut s’attendre à bien des surprises…

Non, pas d’anecdotes sur ses échecs face au peuple de la forêt, c’est bien trop humiliant. Sachez seulement qu’elle en garde rancune.

Dans un murmure elle dit à l’elfe sous elle :

« - Fais attention petite, tu pourrais faire une mauvaise rencontre ici… J’espère que la prochaine fois feras plus attention. Tu es de bonne humeur ? Parce que moi pas trop. »

Bon, la dernière partie c’est plus pour le drame qu’autre chose, intimidation peut-être, mais ca fait partie du jeu.

Maï n'eu pas le temps de dire ouf qu'elle se sentit bloquée, dague au cou. Quelqu'un semblait de bien mauvaise humeur aujourd'hui, et il n'en fallait pas plus pour mettre Maï d'une humeur massacrante.

*Idiote que je suis, ne pas regarder où je met les pieds aussi, sur un truc très proche de la femelle humaine aussi. ARG, c'en est une !...* Pensa-t-elle alors que la voix lui murmurait quelque chose.

Elle testa discrètement la résistance des membres qui la tenait par les poignets. Robustes.

*Bon, alors...*

"Salut M'amselle."

dit-elle d'une voix amusée. Elle était en fâcheuse posture oui, m'enfin...

Elle comprit vite ce qu'elle devait faire. Si elle se transformait, ses membres à elle deviendraient beaucoup plus fins, comme tout son corps. L'ennemie serait surprise, et lâcherait l'étreinte, pendant peu de temps. Une seconde environs. Maï avait suffisamment lu sur les humains pour savoir qu'ils avaient parfois des réflexes impressionnant.

Une seconde pour sauver sa peau. C'était peu.

*Un... Deux...*

Les yeux de la Plume virèrent au noir. Si Eyrie pouvait voir son visage, elle l'aurait remarqué, et cela aurait pu tout gâcher.

*TROIS !*

Le corps entier de Maï se mit à trembler violemment, puis, sur sa peau commença à pousser du poil roux, son nez s'allongea, ses oreilles raccourcirent (et oui, c'est une elfe, ne l'oublions pas !). Le renard apparu. Evidemment, tout cela tint en moins d'une seconde. Elle faufila ses pattes, vive comme l'éclair, et sortit de l'étreinte de sa ravisseuse, en lui décochant une morsure à la jambe au passage.

*Tient, Mademoiselle je-fais-mal-aux-elfes. Un souvenir.*

Elle partit bien plus loin, afin que l'humaine ne puisse pas l'attraper, se retourna, et la fixa.
C'était une drôle d'humaine, très sûr d'elle. Les autres sont le plus souvent aux cuisines et n'en bougent pas...

* AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAHHHH !!!!! La salo*** !!!!!!!! *

Dans sa tête, c’est ce qui se passait, hurlement et injure à l’égard de l’elfe-renard. Elle savait qu’il fallait faire attention, mais qu’est-ce que tu aurais voulu qu’elle fasse ? Qu’elle lui demande de rester tranquille ? De ne pas faire de mauvais coups ? Mais oui, c’est sur que l’elfe aurait obéi au doigt et à l’œil !! Elle ne savait même pas quoi faire de l’elfe après l’avoir immobilisée !

Que faire mais que faire ? Elle ne pouvait pas continuer dans les champs avec cette morsure, la plaie saignait abondamment et le muscle du mollet avait été sérieusement touché. Ses nerfs envoyait des messages de souffrance intense, elle en savait pas quoi faire pour la suite. Elle était un peu prise au dépourvu, si elle aurait été blessée lors d’une attaque sur la route, elle aurait su quel était son plan de retraite, mais ici elle n’avait aucun échappatoire. Peut-être le renard était encore aux alentours ? Elle avait mal vue la direction prise par la petite bête, elle n’avait aucune idée où elle pouvait se trouver.

Elle était couchée sur le ventre en se faisant la réflexion qu’elle devait se protéger, au cas où le renard diabolique reviendrait. Bon, diabolique c’est un peu forcé mais là Eyrie était vraiment en rogne. Son sang imbibait la terre, des tiges brisées collaient à ses pantalons mouillés de son sang. Aller dans la forêt, c’est ce qu’il faut faire. Elle regarda par-dessus son épaule, vis que la forêt était à des milles de marche, marche qui était impossible à accomplir dans son état. Elle resta sur place pour soigner sa plaie donc. Tant pis pour la protection, elle n'avait qu'à espérer que le renard est loin.

Se retournant sur le fessier, elle entreprit de relever son pantalon, pas le couper, elle n’avait pas d’argent pour s’en acheter un nouveau. N’étant pas capable de le remonter suffisamment, elle dû l’enlever et elle s’assit dessus pour se protéger du sol hérissé de tiges piquante. Son outre d’eau à portée de main, elle nettoya la plaie avant de l’asperger d’alcool pour désinfecter. La douleur était de plus en plus intense, elle ne voulait pas s’évanouir, mais elle savait que bientôt la douleur aurait raison d’elle. C’était vicieux comme morsure !! Un coup d’épée ou d’arme en métal, c’est simple et la douleur générée par une telle arme, elle savait gérer. Mais une morsure ? Il y avait quelque chose de différent, ca faisait mal… Même si c’était une petite bébête comme une renarde.

Déposant le fil et l’aiguille qui allait servir à recoudre la plaie dans leur étui, elle se pris la tête à deux mains, tentant de calmer la vague rouge-orangée de douleur qui affluait dans sa tête. Au travers de ses doigts, elle vit un mouvement sur sa droite. Un pelage orange, des petits yeux noirs, le renard !!
Elle eut une illumination. La renarde pourrait l’aider non ? Des petits doigts d’elfe tout fin et tout léger, ce serait parfait. Et elle était mieux d’accepter, sinon elle reviendrait dans ce champs et la traquerait pour lui couper la queue, les oreilles, trancher ses pattes morceau par morceau… M’enfin, plus tard les projets de vengeance, pour l’instant elle a besoin d’elle.

Elle regarda dans la direction où on pouvait deviner un petit trou dans les épis, là où se trouvait selon toute probabilité l’auteur de la morsure.

« - Eh toi !! Je sais, ca commence mal, tu m’as surprise et quand je suis surprise je frappe pour éviter d’être frappée. J’ai pas peur des coups de poing, mais ta morsure j’aurai du avoir peur. Ca fait sérieusement mal là… Je ne suis même pas capable de la recoudre. (Prenant ses dagues par le bout de la lame, elle les lança un peu plus loin) Tiens, geste de paix. J’ai besoin d’aide là, tu sais coudre ? …. »

Elle voyait bien que la petite renarde avait peu envie de venir l’aider, après tout, elle l’avait immobilisée et menacée. Qu’est-ce que les elfes aiment ? Un sourire fugace vécu un millième de seconde sur ses lèvres avant de mourir. Son sac à portée de main, elle sortit son harpe de métal. En fait, c’était un mélange de bois et de métal. Une douce mélodie s’échappa de ses doigts, un petit nuage que sa voix accompagna. À travers sa mélodie elle affirma à l’elfe qu’elle ne lui ferait pas de mal.

Au fond d’elle-même elle se trouva un brin pathétique… Elle vient de se faire mordre et elle est réduite à supplier son assaillante de l’aider. Le contraire de son code de personne me touche. Mais au fond, que faire d’autre ? Attendre que la douleur reflue ? Attendre que quelque chose infecte sa blessure ? À cette pensée, elle frissonna de frayeur. Son corps !? Autant piler sur son orgueil.

L'elfe entendit les cris de douleur, et se sentit un instant très, mais alors très fière d'elle-même. Sensation qui fut ensuite rongée de remord. Elle détestait les humains en général, et avec celle là, là bas, ça commençait mal. Mais avait elle eu réellement besoin de la mordre ? N'aurait-elle pas pu s'en sortir sans faire de mal ? Si. Bien sûr qu'elle aurait pu. Elle a mordu par plaisir de faire mal, par vengeance aussi, une morsure pour tous ces hommes détruisant la nature. Mais elle, là bas, elle n'avait même pas arraché une touffe d'herbe. Elle s'est défendue. Maï aurait pu choisir la simple défense, mais là, elle était en position d'attaque. Un elfe ne fait jamais un acte aussi démesuré.

On ne fait pas de mal sans raison...

Elle avait donc mal agit. La Plume baissa le museau. Une honte. Voilà. Et la grande gigue, au fond, qui saignait, halala. Ca allait s'infecter.

*Pas de mort inutile sur la conscience...*


L'elfe-renarde s'approcha doucement de la grande gigue qui fixait sa plaie d'un mauvais oeil. La femme la vit, et, contre toute attente, lui cria :

« - Eh toi !! Je sais, ca commence mal, tu m’as surprise et quand je suis surprise je frappe pour éviter d’être frappée. J’ai pas peur des coups de poing, mais ta morsure j’aurai du avoir peur. Ca fait sérieusement mal là… Je ne suis même pas capable de la recoudre. (Prenant ses dagues par le bout de la lame, elle les lança un peu plus loin) Tiens, geste de paix. J’ai besoin d’aide là, tu sais coudre ? …. »

*Une morsure contre une dague, c'est plutôt équitable. *

Elle savait coudre, mais à quoi bon ? Devant l'état de la blessure, ça s'infecterait forcément. Elle serait morte trois mois plus tard, et encore, si elle était robuste.

*Jolie harpe, jolie musique, jolie voix.*

La renarde marcha vers la jeune femme, pour écouter la musique de plus près. Quand on est elfe, oui, évidemment qu'on aime la musique !!! Lorsque la femme eu finit, brusquement, Maïwenn fit un demi tour sur ses quatre pattes, et s'enfuit dans la forêt, à l'opposé, hors de vue de la jeune femme.

*Elle doit imaginer que je la laisse.*

Elle chercha dans la lisière du bois des baies, des feuilles de chênes, et tant d'autres objets de la forêt. Elle prit tout cela dans sa gueule et revint au galop vers l'humaine. Elle s'arrêta devant la blessure, et entreprit de mâchouiller consciencieusement la mixture, qui était peu ragoutante.Le tout bien broyé, elle recracha sur la jeune femme, et se transforma enfin en sa forme originelle.

" Faut pas recoudre, l'humaine. Ca va s'infecter. Je sais, c'est dégoutant à voir, mais c'est le meilleur moyen."

Elle regarda la pâte rougeâtre, couleur des baies s'enfoncer dans la chair à vif de la jeune femme.

"Dans quelques secondes, ça ira mieux."

Voilà qu'elle sauvait la mise à un humain. Y a des jours, vaut mieux rester au lit.

Ah ca y est elle s’approche.

Ah ca y est elle s’en va.

Eyrie savait bien que les blessures par morsure c’était une autre paire de manche. Une lame rouillée ? D’accord, elle sait quoi faire. Des égratignures, des os cassés, elle sait s’en occuper. Une morsure ? Jamais… Les bêtes sauvages n’en avait jamais eu après elle, elle avait toujours été respectueuse de la nature, sachant fort bien que les animaux savent se défendre parfois bien mieux que les humains. Elle avait toujours fait attention à ne déranger aucune créature de la forêt, mais aujourd’hui, elle avait commis une faute immense. Elle n’avait pas tué.

Il faut pourtant, action/réaction. Menace/contre-attaque. Et là elle n’avait pas le choix, elle devait s’en remettre à un renard. Un renard !! Bon… Et même à ca, elle s’est enfuie. Génial, au milieu des champs avec une morsure, à moitié à poil avec le mollet en sang. Elle aurait du passer par les chemins battus pour une fois…

Ah tiens, n’est-ce pas une silhouette de renard ? Elle se devait de rentrer ses émotions négatives, c’est pas avec du vinaigre qu’on attire les mouches. Offrant un regard de reconnaissance, elle regarda sans broncher le renard se transformer en elfe et appliquer une pate rougeâtre ayant séjourné dans la gueule du renard qui l’avait mordu. Éviter les infections ?

Un rictus de dégoût faillit faire un tour sur ses traits, mais elle se retint de justesse. La bile montait dans sa gorge, elle pouvait sentir la pâte dans sa plaie, froide et humide dans le chaud et humide.

Prenant plusieurs profonde respirations, elle remercia l’elfe renard, mais avec un sarcasme bien personnel.

« - Je te remercie ou je te maudis ? C’est… étrange. Pourquoi es-tu si loin de la forêt ? D’où sors-tu ? Pourquoi tu m’as foncé dessus ? »
C’était un problème depuis l’enfance, trop de questions, trop en même temps, la plupart du temps sans aucun lien.

« - Comment je fais pour rentrer dans la ville maintenant ?? À moins que tu m’offres de rester un moment chez toi pour que je me rétablisse mais j’aurai trop honte à ta place… Tu m’aideras à retourner dans la forêt, je devrais être capable de poser des collets pour ma nourriture. »

*Je sais que je fais pitié, mais si jamais elle se sent assez coupable je pourrai peut-être avoir de la nourriture gratos. Rien n’est gratos de nos jours, mais quand on viens de se faire mordre, on peut toujours essayer non ? *

L'elfe regardait la blessure cicatriser doucement. La chair se refermait d'elle même, il fallait juste attendre un peu, encore.

"Maudis moi si tu veux, ce n'est aucunement mon problème. Répondit elle après un moment de silence aux questions de la jeune femme. Je suis ici parce que j'aime l'endroit. D'où je viens ne te regarde pas. Et il semble que si je suis tombée sur toi, c'est que je me suis fais avoir par le même trou, ça paraît logique.

Sa voix n'était pas méchante. Neutre, plutôt. Ce que l'humaine pouvait penser ou ne pas penser ne la regardait en aucune façon.

Aux autres questions, elle éclata de rire.

"Pour entrer dans la ville tu attends un peu que ça guérisse. Ca va brûler légèrement, c'est normal. C'est ta chair qui se reforme. Honte ? Honte de quoi ? De t'avoir guéris d'une défense à ton attaque ? Tu plaisantes un peu, demoiselle. Je ne t'emmènerais pas chez moi, ni dans la forêt. D'une part, parce que tu vas pouvoir le faire de toi même dans quelques instants. D'autre part, parce que je n'emmènerai jamais un humain chez nous, ni même dans la forêt, au vu du traitement que vous lui infligez, toi et les autres de ton espèce."

L'elfe se leva.

"Lorsque vous respecterez la nature, sans la blesser avec vos tours et vos habitats, alors ils se pourraient qu'on change de regard à votre égard.

Elle haussa les épaules.

"Ca me semble mal partit, pour l'instant."

La blessure se refermait vite, surnaturellement vite. L’elfe parlait, mais Eyrie n’écoutait pas trop, subjuguée par la cicatrisation éclair de sa morsure.

Ah mais elle me parle encore ? Ah tien elle m’accuse de détruire la forêt. J’ai encore besoin d’être gentille ? Non, elle m’a dit que je guérirai vite. Je reprends difficilement mes dagues, et je me couche sur le dos en remettant mes pantalons.

D’un ton moqueur : « Tu penses que j’y suis pour quelque chose à ta forêt ? Tu nous juges tous sans nous connaître tous, c’est stupide. Ce n’est pas parce que les dirigeants dirigent que leurs directions me représentent moi. La forêt je l’aime, elle m’a toujours protégé. De toutes façon, le monde évolue ma petite, faut t’y faire. »

Je la regarde avec un brin de pitié, les elfes sont si innocent quand on parle de verdure. Moi j’aime la salade, mais je n’en fait pas une affaire personnelle quand des vers ou des chevreuils mangent les plans que je comptais manger moi-même. Dans la vie, les choses évolue. Évolue avec, ou crève, c’est ce que j’ai appris.

"Mais si vos dirigeants font tant de mal, pourquoi alors ne les chassez vous pas du trône ? Tu dis qu'il faut si faire... C'est ainsi que vous réagissez entres vous ? Une personne met la nature à sac, et vous laissez faire en vous disant que c'est la vie ?"

L'elfe n'était pas en colère. Seulement interloquée. Chez elle, dans son village, on ne suivait pas les dirigeants les yeux fermés. Les décisions étaient fortement discutées par toute la communauté. Cela lui semblait étrange qu'on puisse laisser quelqu'un décider pour les autres.

"T'aimes la forêt ?" Dis elle méfiante. "C'est bizarre, pour une fille d'homme ça..."

En effet, cela aussi, la surprenait. les humains étaient connus pour ne rien aimer autour d'eux. Ils adoraient leur égo, et cela s'arrêtait là...

« Tu penses que nous avons la possibilité de chasser les dirigeants ? Tu penses que j’ai choisi ceux qui dirigent le royaume ? Jamais. C’est pour ca que je suis hors-la-loi, car je ne veux pas avoir de compte à rendre à personne. Si je fais un choix ca va être le mien.»

C’est totalement vrai. Elle fait ce qui est le mieux pour elle. Si une forêt doit brûler, elle brûlera, mais c’est un détail que l’on peut omettre dans les circonstances.
Elle n’a pas eu peur de révéler à l’elfe son statut social, après tout, qu’est-ce qu’un elfe des bois retirerait à la livrer aux autorités ?

« J’aime la forêt. Je vis dans la forêt, je dépends d’elle depuis l’âge de 10 ans. (Avec un sourire désabusé) je déteste les humains, autant sinon plus que toi parce que j’en suis une. C’est tellement pathétique… Une fille d’homme !! (Eyrie part à rire) Non, je ne suis fille de personne. »

La voix de la fille était si forte et défiante qu'elle ne pouvait qu'être sincère. Elle avait dit ça avec tant de colère intérieure.

L'elfe se tût. Pour une fois, dans toute sa vie, elle se tût réellement, écoutant attentivement. Cette femme, devant elle, était contre les hommes. Contre ceux qui massacrent et qui pillent. Etait ce bien possible ? Une humaine ? Qui vit dans la forêt ? Hors la loi ?

L'elfe s'assit par terre, relâchant la moindre posture défensive.

"Hors la loi ? Qu'a tu réellement fait pour obtenir ce statut ? Que risques tu ? Pourquoi vouloir aller à la ville ?".

L'elfe se tût a nouveau, fixant l'humaine. Avant que la demoiselle n'ai toutefois le temps de répondre, elle ajouta :

"Si tu es contre les actions de l'homme, alors tu n'es pas mauvaise. Mais il y a un point sur lequel tu te trompes." La Plume avait l'air, tout à coup, plus mûre, plus sage, plus apaisée, aussi. Elle arrêta de fixer la jeune femme pour poser ses yeux à l'horizon, dans le vide absolu, regardant sans voir vraiment. "On est toujours la fille de quelqu'un. Qu'il soit bon ou pas n'est pas la question. Tes ancêtres sont ta racine. Ta terre. Si tu les oublies, si tu ne les connaît pas, ou plus, alors tu es déracinée à vie." Les yeux de l'elfes étaient bien rouges, mais les larmes ne coulaient pas. Elle les contenait. "'Faut être fier d'être fille de quelqu'un..."

Les paroles de l’elfe avaient touché Eyrie, mais sa carapace était trop épaisse pour qu’elle montre le moindre sentiment. L’humaine sentait bien que le sujet d’être fille de quelqu’un touchait beaucoup son interlocutrice, mais que pouvait-elle faire ? S’ouvrir à elle ? À peine l’idée eut-elle effleurée la conscience qu’elle fut mise en pièce, réduite au plus simple néant, un néant rouge et sanglant de déni et de colère.

En son sein, douleur et incompréhension envers ce monde ne cherchent que le réconfort d’un ami, d’une confiance. Mais la confiance pour elle veut dire naïveté, perte de soi, perte de contrôle. Elle a décidé à 10 ans qu’elle trouverait son propre chemin, et elle s’y tient seule. Droite, le menton haut, le regard fier, seule. Besoin de personne, elle se dit forte.

Ca suffit les sentiments. Redresse-toi, et franchement, tu te laisses manipuler par l’elfe. Défend-toi.

« Je suis la fille d’un homme qui ne voulait pas de son enfant. Je l’ai cherché. Mes racines ne font pas ce qui je suis, je suis qui je suis. Ce que tu dis est faux, j’ai toujours vécu sans lui dans ma vie, je n’ai jamais eu besoin de personne, surtout pas des lâches qui refusent leur responsabilités. Si j’ai à être fière de quelque chose, c’est de ne pas l’avoir encore retrouvé pour le tuer. Ca prouve que je vis sans lui. »

Les derniers mots n’avaient pas été crachés, ils étaient sérieux et calme, un énoncé prouvant que la terre dont parlait l’elfe n’a pas raison d’être dans la vie de tous et chacun.

Elle s’étendit plus confortablement. Les questions posées précédemment étaient plus complexe. Elle y pensait moins souvent, ca n’avais jamais été une source de préoccupation, son statut social. Elle fait ce qu’elle a à faire, c’est tout, pourquoi tout le monde pose des questions ?

« On peut dire que je n’ai pas eu le choix, dit-elle en repensant à la première nuit passée dans le repaire des brigands. J’ai tué, j’ai volé, j’ai pillé. Mais vu que je ne suis pas un homme, je n’ai jamais violé, c’est déjà ca de moins. Je risque, entre autre, la mort par pendaison, par décapitage, on peux m’arracher la peau, me crucifier, m’enchaîner aux murailles de n’importe quelle ville, me lapider, me torturer, je passe à coté de certains mais je pense avoir fait le tour. »

Eyrie prit un temps de pause, regarda le soleil danser avec les nuages dans un ciel bleu implacable, indifférent. Qu’elle aimerait rejoindre le soleil en ce moment ! Non seulement sa jambe lui faisait toujours mal mais en plus elle parlait à quelqu’un. Sans lui hurler dessus. Sans avoir l’intention de tout lui faire oublier par après. C'était nouveaux pour elle, enfin pas tant que ca, mais elle n'aimait pas se sentir le moindrement à l'aise. Il fallait que quelque chose arrive. Il faut que quelque chose bouge. Le silence, enfin l'absence de bruits non-normaux dans un champs, le vent, le soleil, les nuages, pourquoi était-ce si malaisant ? Elle devrait se sentir à l'aise avec tout le sang répandu sur le sol, mais même avec cette trace de normalité elle ne se sentait pas normale. Vite, il faut qu'elle soit méchante, qu'elle soit déplaisante, ainsi l'autre partirait. Mais elle fut incapable de suffisamment de méchanceté pour que l'elfe décampe.

« J’ai besoin de me faire un peu d’argent et je suis lasse d’attaquer des diligences, je vais jouer un peu de musique pour faire changement. »

La réalité était qu’elle avait du tuer une jeune femme qui avait le don d’être insensible à la magie. Peu importe combien elle se disait forte et sans pitié, la vie avait une importance à ses yeux que personnes ne peux imaginer.

L'elfe écouta posément les paroles de la jeune femme.

"Si tu n'es pas la fille d'un père aimant, tu es celle d'un grand père qui aurait voulu te connaître. Si ce n'est pas lui encore, c'est un autre ancêtre . Il y a toujours un brin d'amour quelque part. Sûr."

L'elfe aurait aimé savoir d'où elle venait. Sans passé précis on vacille dans le futur.

"Le tuer n'arrangeras rien. Tu éprouveras un sentiment d'intime vengeance, oui... sur le moment, j'imagines que ça fait du bien. mais après ? Après ce sera finit. Effectivement. Sois fière de ne pas le chercher pour le tuer."

Elle écouta la suite des paroles de la jeune femme. Ainsi, c'était une criminelle. Des hommes qui tuent des hommes. Ca, par exemple, elle n'avait jamais comprit pourquoi.

"Et pourquoi donc as tu tué ? Pour te défendre ou par colère ?"

Un vaste silence s'imposa. La fille n'étais pas à l'aise. Elle dit qu'elle avait besoin d'argent, quelle était lasse d'attaquer les diligences, qu'elle souhaitait jouer de la musique.

"joue donc, tu te débrouilles pas mal." Dit l'elfe sans s'apercevoir qu'elle venait de sourire plutôt gentiment. "Pourquoi as tu besoin d'argents ? Pourquoi vouloir aller dans la ville si on te cherche ? C'est suicidaire."

Son sourire commençait à taper sur les nerfs de l’humaine. Non mais pourquoi elle serait gentille en retour ? Il ne faut pas oublier qu’elle l’a MORDU. Un regard noir pour l’elfe, les nerfs d’Eyrie étaient presque à bout. Message d’amour et tout. Elle avait fumé de l’herbe ? Elle sentit par à-coups s’il y avait des relents de fumée suspecte, mais non, l’elfe sentait… les bois.

Bon sentiments, blablabla, un grand-papa qui t’aime, blablabla… Elle commençait à se sentir mal à l’aise avec tous ces messages positifs. Comment réagir ? D’habitude, personne ne l’approche, elle n’a donc pas à se soucier de conversations ayant comme sujet la famille. Personne ne veut l’approcher, elle se prépare toujours mentalement à repousser tous ceux qui ont des bonnes intentions.

L’Eyrie des cités n’a pas a se protéger puisqu’elle est une simple musicienne itinérante, sans passé, sans histoire. L’Eyrie des bois est une brigande, une voleuse, une hors-la-loi. C’est dans les règles non-écrites de ne jamais poser de questions, elle n’a jamais eu à s’en faire. Dans quelle catégorie l’Eyrie du moment se trouvait ? Elle n’était ni simplement joyeuse, ni sombrement menaçante. Elle était dans un simple milieu, un moment éprouvant le besoin d’envoyer promener l’elfe et l’autre moment souhaitant simplement discuter.

Un petit sourire troubla les lèvres de l’humaine en pensant, était-ce pour me défendre ou par colère ?

« J’ai eu le choix. On a toujours le choix évidemment. J’ai eu le choix de me mettre en colère au moment de le faire, mais je ne l’était pas, donc ce n’est pas par colère. Par défense ? Non, car c’est moi qui ai amorcé l’attaque. Par dépit. J’essai de moins tuer le moins possible. Ceux qui me connaissent n’arrivent pas à comprendre pourquoi, ils ont l’impression que c’est facile pour moi. »

D’un ton empli de colère et d'incompréhension, elle continua une tirade qui s’adressait probablement plus à elle-même qu’à Maïwenn.

« Je n’ai jamais voulu tuer, à quoi ca rime ? Toutes les possibilités d’une vie, toutes les joies qu’une personne aurait pu apporter, toutes les leçons qu’elle aurait pu enseigner, toute une vie en sacrifice pour la mienne. Comment peuvent-ils croirent que c’est facile ? »

Se rendant compte que les mots avaient franchi la barrière de ses lèvres et que l’elfe la regardait plus attentivement, elle répondit à la hâte à l’autre question, pour changer de sujet.

« J’ai mon truc pour que personne ne se souviennent de moi. C’est un petit secret, c’est mon secret en fait. Le secret de pourquoi je suis spéciale dans la communauté hors-la-loi. L’argent c’est juste pour vivre, m’acheter des vêtements qui me font, pas seulement volé sur la première personne volée. Vivre normalement un temps… Mais ca ne dure jamais longtemps. »

Son comportement était erratique elle s'en rendait bien compte. Se calmer, prendre des bonnes respiration et pourquoi pas, essayer de laisser l'Eyrie du moment s'exprimer.

"Tu pourrais partir loin, dans une contrée où personne ne te connaît, et reprendre une existence normale, puisque j'ai l'impression que c'est ça qui te manques... Non ?"

L'elfe était sérieuse, dans ce qu'elle venait de dire. Si elle était dans la situation de la jeune femme, elle ferait ainsi. Elle partirait loin et recommencerait tout à zéro. Puis elle se tût longtemps. Observa les blés, les oiseaux... Elle se demandait pourquoi cette jeune humaine s'entêtait à montrer une carapace de cuir, là où en fait, elle aspirait à la paix, la gentillesse. Ca se voyait.

"Au fait..."Ajouta-t-elle."C'est quoi, ton nom ?"

Partir ? FUIR ??

Une grimace de dégoût tord son visage. Mais bien sûr, c’est en fuyant qu’on trouve la solution. Jamais de la vie, jamais elle ne fuit. Elle fait ses choix, elle doit les assumer, ce n’est pas en fuyant que sa vie va changer car elle vit selon ses convictions donc peu importe où elle se trouve, elle va devoir répondre de ses actes de la même manière. Peut-être la mentalité des gens pousserait ceux-ci à la voir différemment mais elle ne peut s’empêcher d’en douter.

C’est ce qu’elle expliqua brièvement à l’elfe, avant que celle-ci lui demande son nom.

« Toi d’abord. »